Fédérer et renforcer l’engagement solidaire de ses collaborateurs, même à distance c’est possible ! Les entreprises proposent du mécénat de compétences à leurs salariés, une bouffée d’oxygène pour la plupart d’entre nous qui cherchons à nous rendre utile face à la crise sanitaire.
Pourquoi ce phénomène prend de l’ampleur ? La population a été littéralement piquée par le « virus de l’entraide » en réponse à l’appel à l’aide des plus démunis et à l’heure du télétravail, les collaborateurs expriment un souhait grandissant de s’engager au sein d’une entreprise solidaire.
Les associations, plus que jamais dans le besoin, s’adaptent vite et proposent des missions digitalisées aux entreprises mécènes. Comment la crise a-t-elle accéléré la digitalisation des associations et transformé les démarches solidaires des entreprises ?
La crise et les confinements successifs : accélérateurs de solidarité ?
Le besoin de solidarité au sein de la société est grandissant. La crise économique et sociale actuelle a bousculé le monde associatif. Cette onde de choc a fortement touché les associations qui font face à des difficultés de trésorerie et manque de personnel. La force vive du secteur associatif reste les seniors, qui voient leurs déplacements limités depuis mars et doivent redoubler de vigilance face au virus. Deux tiers des associations, tous secteurs confondus, sont contraintes de suspendre leurs activités, ou à repenser leur façon de fonctionner[1]. Certaines d’entre elles tentent de se digitaliser, mais cette transformation est coûteuse et chronophage. Celles qui n’y parviennent pas ne se relèveront sûrement pas au sortir de la crise. Sur les 70 000 associations qui naissaient en moyenne chaque année[2] très peu verront le jour en 2020. Le secteur de la solidarité est durement touché en 2020.
Le virus de la solidarité se propage néanmoins en parallèle. Certains sociologues comme François Dubet mettent en avant le caractère « démocratique » du covid-19, qui n’épargne aucune tranche de la population, et qui conduit donc à une angoisse généralisée mais à un élan solidaire tout aussi général.[3] La solidarité s’est ressentie au niveau local dans un premier temps, en témoignent les gestes entre voisins ou envers le personnel soignant de sa commune par exemple. Les Français ont eu en moyenne 2,3 gestes de solidarité pendant la crise sanitaire, lors de la première vague[4]. A cet égard, de nombreuses initiatives solidaires se sont formées, comme COVID-Entraide France (réseau auto-organisé de groupes locaux de solidarité), Bienveillance contagieuse (des groupes d’entraide visant à faire les courses, ou téléphoner à ceux qui en ont besoin par exemple) ou encore Les coursiers solidaires à vélo (un mouvement mettant des personnes qui ne peuvent pas aller faire leurs courses et des coursiers en relation directe).
La solidarité n’étant pas l’apanage des initiatives individuelles, les entreprises se sont également emparées du sujet. Certaines ont contribué à la solidarité générale à l’aide d’un don financier ou en nature. LVMH a par exemple effectué un don de cinq millions d’euros à l’Institut Pasteur pour tester l’efficacité de sa molécule contre le Covid-19, Pernod Ricard a offert 70 000 litres d’alcool pour fabriquer du gel hydro-alcoolique, ou la Maison Hermès a réalisé un don de 20 millions d’euros à l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP). Une entreprise solidaire étant également une entreprise qui permet à ses collaborateurs de l’être, des programmes de mécénat ou bénévolat de compétences ont fleurit et les entreprises se sont inscrites comme bâtisseurs de ponts entre collaborateurs et missions associatives.
Dans ce contexte, d’après une étude récemment menée par l’Association pour le développement du mécénat en France (Admical), 39% des entreprises interrogées ont mis en place des programmes de mécénat de compétences en 2020[5].
Le mécénat de compétences, dispositif phare de la solidarité en entreprise.
La RSE est un facteur déterminant pour l’implication des collaborateurs. 51% ; c’est la part des travailleurs qui ne souhaitent pas travailler pour une entreprise qui n’a pas d’engagement social ou environnemental fort[6].Les entreprises ont en effet un rôle déterminant à jouer dans le développement de la solidarité, les salariés étant de plus en plus demandeurs d’engagement. Une étude du cabinet de conseil Korn Ferry International nous révèle que ¾ des salariés sont déçus du fait que leur employeur ne propose pas plus de moyens de s’engager sur des sujets en lien avec la RSE[7]. Les entreprises deviennent des tremplins d’engagement, leur utilité sociale allant de pair avec leur raison d’être. Ce désir d’engagement est encore plus visible auprès des jeunes, 78% des étudiants considérant que le fait que le travail soit en phrase avec leurs valeurs soit le critère principal de choix d’entreprise.[8] Une entreprise engagée et permettant l’engagement de ses collaborateurs booste ainsi sa marque employeur. Cap sur les programmes de mécénat de compétences !
Le mécénat de compétences est un dispositif clé de la solidarité en entreprise. C’est une pratique grandissante au sein des entreprises. Plus qu’un effet de mode, ces programmes s’appuient sur des bénéfices très réels. Il existe deux types de mécénat de compétences : la prestation de service qui vise à effectuer une mission précise et brève au sein d’une association : le prêt de ressources humaines qui consiste à s’intégrer à l’association pour co-construire une mission, pendant le temps de travail. Officiellement, le travailleur reste sous la responsabilité légale de son employeur initial mais ses journées et missions sont rythmées par l’association à laquelle il vient en aide.
Pour les salariés, le mécénat de compétences permet un partage de connaissances et de savoir-faire. Il permet aux travailleurs de développer également des soft-skills, notamment l’écoute, l’analyse, la capacité à travailler en équipe et l’adaptabilité. Il accroit donc la motivation des salariés, qui se sentent impliqués dans des projets ayant du sens et correspondant à leurs valeurs. L’instantanéité des résultats et la concrétisation des actions menées est également un facteur clé de succès du mécénat de compétences.
Les entreprises y ont, elles aussi, tout à gagner. Les employés sont plus motivés, donc plus productifs. Ils sont moins enclins à avoir envie de quitter leur entreprise, ce qui favorise la rétention des talents et réduit le turn-over. En effet, selon une récente étude de l’Ifop, 67% des travailleurs engagés dans le mécénat de compétences évoquent avoir un sentiment d’appartenance plus fort à leur entreprise. Il est par ailleurs un véritable levier d’individualisation des parcours et d’accompagnement des travailleurs séniors vers leur retraite. D’un point de vue financier, ces entreprises peuvent bénéficier d’un dispositif de défiscalisation qui limite leur engagement financier et rend le mécénat de compétences d’autant plus attractif. Depuis la loi Aillagon du 1e Aout 2003, elles peuvent désormais être défiscalisées à hauteur de 60% des salaires de leurs collaborateurs concernés[9].
De plus en plus d’entreprises font donc le choix avantageux en tout point du mécénat de compétences, d’ailleurs 4 000 entreprises y ont recours d’après le baromètre Admical publié en 2018. Ce phénomène n’est pas réservé exclusivement aux grandes entreprises, par exemple, Doctolib a lancé en septembre 2019, un nouveau programme d’engagement solidaire appelé DoctoCommit.
Zoom sur le programme Engagement Citoyen de la Fondation SNCF
Enjeux du programme :
Depuis 1995, la Fondation SNCF défend des valeurs propres à l’ADN du Groupe, telles que la solidarité, la diversité, la proximité et l’engagement. La Fondation a mis en place un programme de mécénat de compétences depuis 2012, grâce auxquels se sont engagés plus de 4000 salariés.
Le dispositif :
La plateforme digitale mise à disposition des collaborateurs leur permet de s’impliquer sur leur temps de travail, jusqu’à 10 jours par an. Les salariés peuvent consulter les projets et missions des associations, postuler et compléter l’évaluation de sa mission en remplissant un formulaire. Dans une optique de cohésion des équipes, les managers peuvent proposer des missions solidaires de groupe, et d’y inscrire leur équipe.
L’adaptation au contexte inédit :
Face au contexte de la crise sanitaire, la SCNF a mis en place un système de filtrage sur sa plateforme digitale, afin de donner la possibilité à ses employés de s’engager à distance. Les missions concernées sont principalement des missions de coaching, comme accompagner un jeune dans son cursus scolaire, aider une personne à s’intégrer professionnellement ou accompagner des personnes réfugiées. Cette évolution digitale a été un succès puisque le nombre de missions réalisées en 2020 est presque le même que celui de 2019 (211 cette année contre 225 en 2019).